Pour favoriser des collaborations créatives et fructueuses, rien ne vaut une réunion présentielle ! Après avoir été parmi les premiers en France et en Europe à évoquer les concepts de « zoom fatigue », et de travail hybride, notre société, ALHAMBRA INTERNATIONAL s’est penchée avec son équipe de consultants sur une étude comparative portant sur l’efficacité des réunions virtuelles et des réunions et/ou meetings présentiels.  

« Si votre champ visuel est étroit, vos fonctions cognitives le seront probablement aussi », explique Jonathan Levav.

Même si la pandémie est en forte baisse et favorise un retour progressif au bureau, une proportion importante d’Américains et d’Européens va continuer au moins partiellement à travailler à domicile, en s’appuyant sur la visioconférence pour les échanges et les réunions collectives.

Pourtant, alors que la facilité de se rassembler virtuellement, notamment grâce aux nouvelles technologies a rendu possible le passage à un travail à distance généralisé, une nouvelle étude révèle que les réunions virtuelles présentent quelques inconvénients et qu’elles ne facilitent pas la collaboration créative.

Plus d’idées en face à face

L’étude, co-écrite par Jonathan Levav de la Stanford Graduate School of Business et Melanie Brucks de la Columbia Business School, révèle que les équipes réunies en « face to face » ont généré plus d’idées que les équipes à distance travaillant sur le même problème.

Dans une expérience en laboratoire menée à Stanford, la moitié des équipes ont travaillé ensemble en « face à face » et l’autre moitié l’ont fait en ligne. Les équipes en « face à face » ont généré 15 % à 20 % d’idées en plus que leurs homologues virtuels. Dans une expérience distincte impliquant près de 1 500 ingénieurs d’une multinationale, des équipes en « face à face » ont proposé plus d’idées, et ces dernières ont reçu des appréciations plus élevées pour leur originalité et leur pertinence. Contrairement à l’expérience en laboratoire, les ingénieurs de cette multinationale avaient de véritables incitations à proposer de bonnes idées car elles pouvaient potentiellement évoluer vers de nouvelles applications commerciales.

Le champ visuel

Les chercheurs disent avoir identifié une raison pour laquelle les réunions en ligne ont généré moins de bonnes idées ; en effet, lorsque les gens se concentrent sur le champ de vision étroit d’un écran, leur réflexion se rétrécit. « Si votre champ visuel est étroit, cela réduit vos fonctions cognitives » déclare Jonathan Levav.

En revanche, les gens qui se rencontrent en personne ont des « stimuli » créatifs en se promenant visuellement dans l’espace dans lequel ils sont, ce qui les rend plus susceptibles de se promener cognitivement aussi. « Dans une interaction vidéo, vous devez fixer votre regard sur l’écran, sinon vous projetez vers votre partenaire que vous regardez autre chose et que vous êtes distrait », explique Jonathan Levav. Mais cette distraction est en réalité utile quand il s’agit de susciter des idées.

Un défi managérial

Le professeur prévient toutefois que ces découvertes ne signifient pas que les réunions virtuelles n’ont aucune valeur. Fait intéressant, les professeurs Levav et Brucks ont constaté que les réunions virtuelles ne semblaient pas entraver la bonne entente des participants. En utilisant une analyse sémantique de la façon dont les participants se parlaient, ils ont constaté que les équipes virtuelles et en personne montraient le même niveau de confiance mutuelle et de connexion sociale. Son étude a aussi révélé que les équipes se réunissant en ligne réussissaient aussi bien, voire mieux, que les équipes en personne lorsqu’il s’agissait de sélectionner les meilleures idées.

La vraie leçon, dit le professeur Levav, est que les coûts et les avantages du travail à distance sont plus nuancés et moins bien compris que la plupart des gens ne le pensent. « Le passage au travail à domicile est une réalité » dit-il. « Mais la pandémie a surgi sans nous donner l’occasion de réfléchir à la bonne façon de travailler à distance. Si nous voulons réussir cette transition, nous devons décider de la façon dont nous allons gérer le processus. Ce sera le défi managérial des prochaines années »

Explorer d’autres contextes

Comme le travail à distance reste un élément incontournable de la vie professionnelle de plusieurs dizaines, voire même de centaines de millions de personnes, il serait intéressant d’explorer le fonctionnement des réunions virtuelles dans d’autres contextes, tels que les entretiens d’embauche et les collaborations de groupe plus larges. Mais pour l’instant, il dit : « Nous n’en savons pas encore assez pour porter un jugement catégorique sur la supériorité du travail à distance par rapport au travail présentiel. Nos recherches montrent qu’il y a de la subtilité. » Autrement dit, il est trop tôt pour tirer des conclusions.

Cette analyse comparative entre les meetings virtuels et les meetings en face à face est très intéressante, car elle survient dans un contexte particulier de développement du télétravail et notamment du travail hybride qui va s’imposer progressivement dans le monde. Comme lors de l’une de nos précédentes analyses sur la « zoom fatigue », c’est dans les universités américaines et leurs laboratoires de recherche que ces études sur l’avenir et l’organisation du travail émergent. Nous partagerons les études similaires sur l’avenir du travail dès qu’elles seront effectuées en Europe à travers les entreprises, business schools et organisations professionnelles comme l’ANDRH en France. 

Pierre Maurin

Partner Alhambra International